Nord-Kivu : Badilika Droits Humains dénonce une stratégie d’extermination par la faim et le recrutement forcé à Rutshuru

L’organisation Badilika Droits Humains alerte sur une stratégie d’extermination silencieuse mise en œuvre, selon elle, par le groupe armé M23, avec le soutien présumé des Forces de défense rwandaises (RDF), dans la région de Kiwandja, territoire de Rutshuru, à l’est de la République Démocratique du Congo.

Dans un communiqué transmis lundi 04 août à Bunia-info24.cd , l’ONG dénonce une série d’exactions commises entre le 18 et le 25 juillet 2025, notamment la saisie forcée de terres agricoles, l’extorsion financière des cultivateurs, la privation de nourriture, et le recrutement forcé de jeunes civils, qui constituent selon elle des violations graves du droit international humanitaire.

Des centaines d’hectares confisqués : les familles privées de leurs terres nourricières

Selon les témoignages recueillis par Badilika, dans les localités de Karama, Chengerero et Kalambi, deux tracteurs non immatriculés ont été déployés dans la zone agricole de Première Domaine pour labourer de force plus de 800 hectares de champs appartenant à des civils. Ces terres, déclarées biens de l’État, ont été placées sous contrôle militaire du M23 sans consultation ni indemnisation des propriétaires.

Durant l’opération, au moins huit cultivateurs auraient été blessés par balles alors qu’ils tentaient de s’opposer à la saisie de leurs champs. L’accès à ces terres est désormais conditionné à un paiement obligatoire de 20 à 100 USD, suivi d’une redevance supplémentaire de 10 USD par champ et 7 USD par sac de vivres produit.

Risque de famine : “une arme de guerre contre les civils”

Pour Badilika Droits Humains, cette situation s’apparente à l’utilisation délibérée de la faim comme arme de guerre, avec un impact direct sur la survie de la population locale, notamment les femmes enceintes, les enfants, les personnes âgées et les malades.

L’ONG insiste : « Ces actes ne sont pas isolés, ils s’inscrivent dans une stratégie bien organisée de désorganisation sociale et de domination par l’appauvrissement », et qualifie ces méthodes de “nettoyage économique et social”.

Recrutement forcé à Ishasha : plus de 100 jeunes disparus

Le 31 juillet 2025, plus de 100 jeunes civils auraient été enlevés de force à Ishasha par des éléments du M23. Certains auraient été aperçus à Rutshuru, enrôlés de force dans des tenues militaires. D’après le rapport, ces jeunes sont envoyés en première ligne contre les FDLR, servant de “chair à canon” dans des affrontements meurtriers.

Badilika accuse une volonté délibérée d’affaiblir une frange spécifique de la jeunesse locale, notamment issue de la communauté Hutu, dans ce qu’elle qualifie d’extermination déguisée.

Des officiers déjà cités dans des massacres

Ces opérations seraient dirigées par le Colonel Amani Claude, cité pour son rôle présumé dans le massacre de Kishishe (décembre 2022), sous la coordination du Général Boudoin Ngwaro, commandant du M23/AFC, déjà mentionné dans plusieurs rapports pour violations graves des droits humains dans l’est du pays.

Les actes documentés à Kiwandja et Rutshuru relèvent, selon l’ONG, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre définis aux articles 7 et 8 du Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI).

Appel à l’action : justice, protection des civils, pression internationale

Dans son message, Badilika Droits Humains appelle :

  • Le Gouvernement congolais à documenter les exactions, protéger les populations et traduire en justice les responsables.
  • La CPI à ouvrir une enquête indépendante sur les faits et à établir les responsabilités des Colonel Amani Claude et Général Boudoin Ngwaro.
  • La MONUSCO, les Nations Unies, l’Union africaine, et les organisations de défense des droits humains à faire pression sur le Rwanda pour mettre fin à son soutien présumé au M23.

Badilika conclut : « Le silence équivaut à de la complicité. Il est encore temps d’agir pour éviter une tragédie humaine de grande ampleur. »

Justin Mupanya, correspondant à Beni

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